Bloc ou cascade ?

De retour sur l’article du papier à l’écran.
J’avais indiqué que la mise en scène/la mise en pratique des compétences n’était pas tout à fait la même suivant le projet. Comme il fait beau et que les oiseaux chantent, c’est le moment d’y revenir.

Le retour d’expérience laisse penser que c’est en changeant le support, c’est à dire en passant d’un jeu papier à un jeu vidéo, que nous avons trouvé une nouvelle manière de faire bosser les apprenants (car c’est en faisant des serious game que l’on découvre comment en faire, pour peu qu’on prenne deux secondes pour regarder dans le rétroviseur.)

Dans nos premiers projets, nos avions, sans le savoir, conçu des serious game de type monobloc. Dans le dernier, nous concevons quelque chose qui s’apparente plus à une cascade de domino. Oui, ce sont des termes hyper techniques que nous allons expliciter.
Accrochez-vous.

Le bloc de compétences
Dans StarHack, l’apprenant connait déjà toutes les compétences métier nécessaires. Il connait les concepts de firewall, de sécurité informatique, de lieu de stockage des données, de la nécessité de communiquer, etc.
Lorsqu’il découvre le jeu, il va surtout appréhender ses règles, puis il va passer la partie à réagir face au scénario, c’est à dire à élaborer la meilleure stratégie pour remporter la victoire.
Autrement dit, non seulement il possède les softs skills et les hards skills nécessaires pour jouer, mais en plus il va les mobiliser en même temps. Comme s’il s’agissait d’un seul bloc.
La partie va venir mettre à mal ses compétences. Les dilemmes qui vont se poser vont mettre le joueur face à des choix problématiques. Va-t-il favoriser la réaction ? L’anticipation ? Va-t-il communiquer ses idées ou décider tout seul ? Va-t-il douter ?
Peu importe.
Lors du débriefing, nous revenons sur le cour de la partie et nous prenons le temps décortiquer chaque compétence. Nous insistons également sur les procédures : posséder les bons réflexes est une bonne chose. Les jouer dans le bon ordre est encore mieux.

La cascade de domino de compétences
Un jeu vidéo est un jeu qui évolue beaucoup. On peut facilement changer les règles, modifier les objectifs, ajouter des briques de gameplay. Mais pas seulement. Le jeu vidéo nous permet de scénariser l’expérience ludique et de découper des phases de jeu.
Par exemple, dans un premier temps, l’apprenant va visiter l’exposition universelle et recueillir des informations. Dans cette phase, il s’agira pour l’apprenant de développer son sens de l’observation, du contact, peut-être de la négociation suivant ses choix, il pourra obtenir des rendez-vous, intégrer une équipe, en un mot, il va mobiliser ses soifs skills.
Une fois cette visite effectuée, l’apprenant retournera dans son atelier. Cette fois, il va devoir inventer quelque chose. Pour ce faire, il pourra recourir aux contacts obtenus précédemment, il va devoir réfléchir négocier ses matières premières (compétences qui a été vu avant), mais il va devoir réfléchir au process industriel, à ses coûts, à sa rentabilité, son ROI. Cette fois, ce ne sont plus les mêmes compétences mobilisées.
Dans une troisième étape, ou durant la seconde, il pourra effectuer une étude de marché, voir ses concurrents, leurs prix, pour définir sa stratégie commerciale.
Enfin, lorsque la chaine de production est en place, l’apprenant va devoir jauger s’il a besoin d’un nouveau financement, sur la manière dont il va faire connaitre son produit, ses events etc.
Chaque étape propose son gameplay… Chaque étape nous fait nous arracher un peu plus de cheveux… que je n’ai plus.

Au final, l’apprenant aura traversé une expérience composée de phases successives, qui auront nécessité le recours à des compétences différentes, à différents moments.
D’où les domino.

Qu’en conclure ?
Et bien que le fait d’utiliser un jeu qui évolue dans le temps permet de faire évoluer les compétences mobilisées.
Si j’en reviens à la définition d’Alvarez du jeu sérieux (partie ludique et partie pédagogique – pour aller très très vite), quand la partie ludique change, la partie pédagogique également.
Je note au passage qu’un scénario qui évolue permet aussi de faire jouer un rôle qui évolue à l’apprenant. Ce scénario va venir en renfort des parties ludiques et pédagogiques…

(Nan mais attendez, serait-il possible de redéfinir le jeu sérieux en lui ajoutant la partie scénario ? Le scénario est-il intégré à la partie ludique ou est-ce un élément à part ? Julian ?)

Est-ce que c’est propre au jeu vidéo ?
C’est une bonne question.
Je n’en sais rien.
Quand nous avons bossé sur l’escape game Les yaourts carnivores, nous avions instinctivement fait cela, mais sans changer les règles. Nous avions un scénario qui se complexifiait au fur et à mesure de la progression, partant d’énigmes un peu facile pour nudger (nan ce mot n’existe pas mais il sonne bien :)) l’apprenant, aux énigmes hyper balaises de la fin qui contenait le core de ce qu’on voulait leur faire travailler.
J’ai quand même l’intuition que c’est plus facile avec des jeux qui évoluent, qui ont de vraies phases différentes, ou des briques de gameplay qui viennent en renfort, et du coup, ça semble plus facile à mettre en oeuvre dans un jeu vidéo (encore que, il parait que Zombies Kids fait cela – à tester donc).

Est-ce que cela change le brief ?
A priori non. Enfin, peut-être faudra-t-il plus de temps pour expliquer le jeu.
« Alors c’est un jeu qui change, du coup c’est un peu comme si tu allais enchainer plusieurs jeux, mais en vrai y en a qu’un… »
Peut-être oui. Mais mieux que cela.

Est-ce que cela change le débrief ?
A priori. Mais on peut facilement imaginer des debriefs intermédiaire histoire de ne pas oublier le travail accompli durant chaque phase de scénario.
« Tu te rappelles y a 3 heures ? Mais si, quand tu as recruté les fourmis de l’espace, avant des envoyer sur Gluxk 354, et bien à cet instant, tu as fait preuve de bienveillance, d’écoute tout en gardant à l’esprit ton management stratégique »…
Oui hein, un débriefing trop lointain c’est jamais bien (on peut par contre faire des piqures de rappel, mais c’est autre chose).

Au final, nous avons une nouvelle boite à outil. Le chemin est encore long avant que le projet arrive sur les écrans des apprenants, mais grâce à lui, nous apprenons beaucoup.

A bientôt, et prenez soin de vous.

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