12 juin 2013 – 10 heures.
Quinze minutes de course, ce n’est pas beaucoup et pourtant, j’ai bien cru crever. Et tu t’en es rendu compte. Tu t’es demandé pourquoi, tu as souri, même rigolé, et tu t’es dit que ça ne me servirait à rien. Sauf que d’après le médecin, c’est bien en deçà de ce qu’il me faudrait. Alors ton avis, tu sais où te le foutre.
Après la course, viennent les étirements. J’arrive à peine à lever la jambe. Je tire, je souffle, et je tire encore. J’espère que ça m’empêchera de trop souffrir demain. Et après demain. Là encore, je te vois du coin de l’œil. Tu ne peux t’empêcher de me regarder. Je devine ce que tu te dis. Tes chuchotements avec tes potes. Ton mépris. Ton jugement.
Je suis gros.
Et pour toi, c’est ma faute.
On ne naît pas gros, n’est-ce pas ? On le devient. Attends, laisse moi continuer : je dois bouffer comme une vache, vautré devant ma télé. Je ne branle rien. Je me laisse couler dans une torpeur proche du suicide. Et d’ailleurs, si je mange autant, c’est bien pour me suicider. C’est parce que ma-maman-ne-m’a-pas-suffisamment-aimé-que-je-me-sens-si-seul-que-je-cherche-à-appeler-à-l’aide-en-me-détruisant ! Et mon père, sans doute faible, ou absent, peut-être même mort. Aucun homme ne peut rester stoïque devant une telle transformation. Pour ne pas m’avoir recadré enfant, faut être malade !
Petit exemple de ce que tu penses. Toi, et tous les autres « tu ». Toujours cette même rengaine, ce même jugement, cette même haine.
Je ne t’ai pourtant rien fait.
Mais ma simple existence suffit à t’insulter.
Juste m’entrevoir provoque en toi dégoût et rejet.
Alors, que je fasse un peu d’exercice pour me reprendre en main devrait te satisfaire. Tu pourrais te montrer encourageant, compatissant, ou juste indifférent ; mais non. Le gros qui court est ridicule : son ventre ondule à chaque pas comme une mer mauvaise, ses genoux sont prêts à rompre, son visage est pourpre, ses poumons hurlent à la mort et son cœur est à deux doigts d’exploser.
C’est marrant.
Effectivement.
Mes clefs de voiture sont toujours en poche, me voilà rassuré : au bout de dix minutes, je ne les entendais plus tinter dans mon jogging. Faut dire, le tissus est un peu étroit.
Je m’éloigne de la piste de course en cherchant à reprendre mon souffle. Mes jambes avancent seules, comme animées par une volonté propre. Mes bras tombent mollement le long de mes flancs, me pesant sur les épaules et le dos. Je transpire beaucoup, et tu me contournes, bien à distance, car tu supposes, que comme tous les gros, je pue. Cette puanteur lourde émanant de ce que je mange, mais renforcée par mon propre corps, sorte de catalyseur géant pour matière grasse. Cette puanteur même qui te fait douter de ma propreté. Doute d’ailleurs étrange : en quoi ma corpulence influence-t-elle mon hygiène ? Qu’est-ce qui te laisse penser ça ? Mes bourrelets ? Sais-tu seulement ce que c’est que les entrouvrir le matin, pour les nettoyer, et de les rouvrir pour les essuyer, en faisant attention de bien les sécher, pour éviter toute irritation ? Ces cerceaux de chair, qui te révulsent tant, tu n’imagines pas combien il faut en prendre soin. Mais ce n’est pas le genre de détails qui t’embarrasse : tout ce qui compte, c’est de faire disparaître le gros. De le tuer. Que ton regard puisse embrasser une société parfaite sans obésité, constituée uniquement de ventre plat, ou tout juste rond. Dans ta vision du monde, t’es-tu seulement rendu compte que tu étais presque un nazi ?
Non hein.
Parce qu’on ne fait que se moquer.
Et que se moquer n’est pas « grave ». C’est sans importance. Ce ne sont que des mots.
Mais des mots masquant une idéologie nauséabonde.
J’ouvre la portière, je m’assois dans la voiture qui ploie sous mon poids. Les amortisseurs grincent. C’est ainsi avec cette vieille bagnole. Toutes les pièces sont usées. Mais peu importe, tu y vas de ta bonne vanne : « le gros va péter l’essieu ». Certes, le gros aurait dû s’acheter un 4×4, mais le gros ne le peut pas, il n’en a pas les moyens. Pourquoi ? Parce que le gros ne travaille pas : il est fainéant. Le gros vit des allocs, il parasite la société, il ne sert à rien. Pire, cette inutilité dont il profite le fait déprimer. Et dans sa déprime, il se goinfre plus encore. Et devient de plus en plus gros.
Tu as remarqué combien tes préjugés sont logiques ? Comment ils s’articulent avec évidence ? Pour former un cercle vicieux où quoi qu’il fasse, le gros est condamné.
Je subis ce discours depuis si longtemps, que je ne sais pas quoi lui répondre.
Au fond, je l’ai intégré, comme tout le monde.
Le gros n’est ni plus idiot ni plus malin qu’un autre.
Il est juste plus encombrant.
Il en a ras-le-bol de t’entendre, il voudrait juste vivre en paix, que tu le laisses tranquille, mais c’est trop te demander.
Pour toi, le gros ne devrait même pas exister.
La clef tourne, le démarreur s’enclenche, et me voilà parti pour rentrer chez moi.
Enfin.
12 juin 2013 – 12 heures.
Après le sport, je dois ingérer des protéines. Je ne dis pas manger, car le diététicien insiste bien sur ce point : je ne sais pas encore manger. Mais grâce à lui, je vais apprendre. Je n’avais pourtant pas l’impression de ne pas savoir. Les quantités me semblaient raisonnables, l’apport en sucre aussi. Il y avait bien quelques aliments que je n’arrivais pas à gérer tels les petits écoliers, les cookies aussi ; en fait, tout ce qui contenait du chocolat.
Le chocolat, le gros n’a pas le droit d’en bouffer : quand tu l’observes, chaque bouchée est un pas de plus dans l’obésité. Peu importe qu’il n’en mange que trois grammes par jour, c’est trois grammes de trop.
Pour toi, le gros devrait s’empêcher d’ingurgiter des saloperies. Il devrait se contenter de salades, jusqu’à en crever. Ou alors, par respect, il devrait se cacher, histoire de se bâfrer en douce. Parce que le gros qui mange est écœurant. Il va trop vite, il prend de grandes bouchées, disproportionnées, comme le sont sa bouche et son estomac. Le gros ne s’alimente pas, il aspire tout ce qu’il trouve. Un véritable trou noir sur patte.
Le gros te révulse.
Il te rappelle combien tu pourrais le devenir.
Car tu oublies un peu vite qu’en vieillissant, tu grossiras.
Mais le vieux gros est acceptable. Il fait bon vivant, réjouissant, alors que le jeune gros est une désolation.
Avec la viande viennent des légumes cuits à la vapeur. Je peux les saler, les poivrer, mais c’est tout. Toute sauce est interdite. Tout condiment aussi.
La nourriture glisse dans l’assiette, de l’assiette à la fourchette, de la fourchette à ma bouche. Le goût est fade, amoindri, triste. Je n’apprécie pas plus que ça le véritable goût de ses haricots verts. Et je déteste la sensation de légèreté qui suit le repas, l’impression de ne pas avoir assez mangé, de ne pas être rassasié. J’ai beau me jeter sur des hectolitres d’eau, ça ne change rien.
Oui, de l’eau.
Car le gros ne se noie pas dans les sodas comme tu l’imagines. Le gros ne court pas derrière le sucre.
Toi et tes préjugés de merde.
Si tu savais combien je vous hais.
12 juin 2013 – 14 heures.
Le reste de la journée, malgré le soleil, je reste dans l’appartement. Au frais. Les voisins quittent l’immeuble pour se rendre dans les parcs, dans les piscines ou que sais-je encore. Leurs enfants crient de joie, les parents leur hurlent de se calmer et la joyeuse cohue disparaît dans l’ascenseur.
J’aimerais avoir une vie de famille.
Mais tu n’as pas voulu de moi.
Pourtant, je suis tombé amoureux et, malgré mon apparence, il m’est arrivé de rassembler mon courage pour venir te l’avouer. Tu ne m’as jamais pris au sérieux. Comment pouvais-je l’être à tes yeux ? Le gros est un bon copain. Peut-être le meilleur même : il ne veut pas de mal, mieux, il est asexué, le gros ne provoque pas le désir, pire, s’imaginer coucher avec le gros est impossible. Malgré les vidéos sidérantes sur internet, tu ne peux concevoir de tels ébats. Trop de chair tue la chair.
Tu t’en tiens à l’amitié, fidèle, distante, fraternelle.
Et je comprends. Je n’en parle plus. Je ravale mes sentiments, les ingère, les digère, à grands coups de larmes. Puis je cherche à t’oublier, jusqu’au moment où le cœur refait des siennes. Sauf qu’avec l’expérience, j’apprends à ne plus en parler. Je garde mes sentiments bien au chaud, à l’intérieur de ma carapace de gras. Ils ne t’atteignent plus et tu ne les atteins plus. Mon armure suintante te tient à distance. Simple réflexe de survie.
Certains y arrivent tout de même, des gros courageux. Ils traversent l’adolescence sans séquelles irréversibles, ils croient encore en toi, ils te cherchent, te rencontrent et parfois te convainquent. Pour être honnête, je ne sais pas comment. Mais le fait est là. Ils te séduisent, et te font même des enfants.
Et là le doute s’installe lorsque tu observes ces bambins au goûter : vont-ils devenir comme leur père ? Car être gros, c’est bien de famille. Et comme c’est de famille, pourquoi ce père-gros ne donne-t-il pas à ses enfants des fruits plutôt que des gâteaux ? Il ne sait donc pas ce que c’est qu’être gros ? Il ne se rend pas compte de ce que risquent ses enfants ? Des problèmes de santé ?
L’opprobre est sur toute la famille. Telle une malédiction calorique.
Le père-gros est forcément un père indigne : puisqu’il ne sait pas s’occuper de lui, se prendre en main, comment le pourrait-il avec ses enfants ?
Toujours cette logique.
C’est si facile de juger à l’emporte pièce.
Pour ne plus t’entendre déblatérer de telles âneries, je reste cloîtrer chez moi. Je t’observe par la fenêtre, partir avec ta petite famille, souriant, fier, inconscient du bonheur que tu vis. Et je t’envie. J’aimerais être à ta place. Sauf que je serais moins con.
Je tire les rideaux et allume la clim. Je n’aime pas la chaleur de l’été. Elle invite à se déshabiller, à s’exhiber. Sauf que le gros ne veut surtout pas se montrer. Il ne souhaite pas exposer ses vergetures, sa peau flasque ou ses parties tombantes. Il sait qu’il est gros. Et il connaît tes sentiments, ton regard, tes moqueries, tes insultes. A force de te voir le détester, il hait son corps. Il le subit. Il en a honte. Il ne veut pas t’imposer sa vue, de peur de te subir.
Le gros se cache du soleil pour se cacher de toi.
12 juin 2013 – 18 heures.
En fin d’après-midi, je retrouve mon psychologue. Ce rendez-vous m’est nécessaire, il me permet de parler de toi, d’échanger à ton sujet, et d’essayer de te comprendre, pour mieux t’accepter et donc m’accepter.
Ce rendez-vous n’est possible que par ma chance de ne pas avoir de travail. Car lorsque tu me reçois en entretien d’embauche, pas besoin de long discours ni de tests bizarres, tu ne veux pas d’un gros dans ton entreprise, car, en dehors de la suspicion de fainéantise, tu te doutes que le gros n’a pas une bonne santé. Entre son alimentation, le manque de sport, son teint pâle et son asthme, le gros n’en a plus pour longtemps. Il est en sursis. Et tu sais que tout le monde le sait. Or, un tel employé est nocif pour l’ambiance, pour la cohésion d’équipe et pour la productivité. Car oui, le gros est lent aussi. Et ce, peu importe le poste, intellectuel ou manuel. Car le gras l’alourdit, jusqu’à ses pensées. Aussi, lorsque tu lui assures que tu le rappelleras, le gros ne se fait aucune illusion. Il a bien compris ton regard.
J’en discute avec le psychologue et il a beau m’expliquer que ce rejet du gros est propre à cette société, que dans les pays en voie de développement, être gros signifie être en bonne santé, que tout le monde là-bas espère le devenir, ça ne change rien au problème : tu te fous de ces pays lointains et de leurs valeurs, tu ne vis pas là-bas, tu ne souhaites pas y vivre, tout juste les traverser durant tes vacances, et ton objectif est bien de rester maigre, quitte à maltraiter ton corps.
En fin de compte, lorsque j’exprime mon envie d’en finir, ou de violence, le psychologue me laisse aller jusqu’au bout de mes pensées, pour y revenir ensuite. Je ne suis qu’un homme, m’assure- t-il, et je souhaite vivre comme tous les autres, car c’est ainsi que l’homme est fait : il est un être social qui ambitionne l’intégration.
Sauf que l’intégration repose sur la ressemblance.
Et je ne te ressemble pas.
Alors tu ne m’acceptes pas.
Ne reste enfin de compte que ton rejet, et la souffrance qui en résulte.
12 juin 2013 – 18h30 heures.
Ensuite, je devrais me rendre dans une salle de sport pour y effectuer quelques exercices. Mais je n’en ai plus le courage.
Par ta faute.
12 juin 2013 – 19 heures.
Le soir, alors que les voisins rentrent, fatigués par le soleil, pressés de coucher les enfants, les enfants eux-mêmes pressés de se coucher, et que retentissent les cris dans les appartements pendant que certains refusent de prendre leur douche et les autres de manger, je me fais un repas composé de salade et de légumes frais, sans fromage, sans sauce, sans goût en somme, puis une mixture protéinée.
Comment en suis-je arrivé là ?
En renonçant.
Ton dictat de corps émincé, tes joues creuses, tes bras de mantes religieuses, ton ventre vide et tes cuisses rachitiques ont eu raison de moi.
Certes, je ne suis pas très courageux, mais des années de souffrances, condensables en noms d’écoles : primaire, collège, lycée, fac, suffisent à exprimer la densité de tes attaques. Pas un jour, pas un instant de répits.
Dire que je ne t’ai rien fait.
Et que tu m’en veux à ce point.
Au début, j’ai pourtant tenté de te pardonner, mais il y a eu un point de non retour. Il y a eu cette sorte de fracture entre toi et moi. Elle fut si intense, si profonde, que j’avais emprunté une corde à mon grand-père. Après une brève recherche, je l’avais passé par dessus une poutre de sa maison de banlieue, j’avais réalisé un nœud coulant en suivant les indications d’un site expert en la matière, puis j’étais monté sur un tabouret.
Un.
Deux.
Trois.
J’avais plongé.
Comble de l’ironie, la poutre était pourrie. Elle céda. Était-ce un signe ? Je ne le saurais jamais.
Cette tentative avortée m’a tout de même permis de me reprendre en main. Conscient que je voulais vivre, j’ai passé quelques coups de fils, pris quelques rendez-vous, et la machine était lancée.
Depuis ce triste événement, j’ai perdu dix huit kilos.
Mais ton regard n’a pas changé.
En vérité, il ne changera jamais.
15 juin 2013 – 09 heures.
Je suis nu sur la balance. Je dois me pencher pour constater la nouvelle. J’en suis à vingt et un kilos en moins. Et tu me maudis toujours autant. Et je commence à te maudire. J’ai l’impression que jamais je ne parviendrai à disparaître de ton regard.
Il faut que j’insiste pour que tu m’oublies, pour que tu arrêtes de me mépriser, de me haïr.
Je n’en parlerai pas au psychologue, d’ailleurs, il m’ennuie. J’ai l’impression que nos échanges sont stériles : je m’exprime, il écoute, mais sans rien m’apporter. Quel est son véritable rôle ? Celui d’une oreille géante ? D’une statue muette ?
Je suppose d’ailleurs qu’il se refuse à m’en dire plus, faute à son propre dégoût : malgré ses études, il n’en reste pas moins un homme comme un autre, un homme gêné par la présence d’un obèse.
Je pense à…
Non, c’est trop tôt.
21 juin 2013 – 11 heures.
Je suis entré dans la phase deux de mon régime. Je ne prends plus les protéines. J’en reste aux salades et aux aliments simples. Je maigris d’autant plus vite. Et tant pis si j’ai des carences. Ou si mes muscles fondent. Tout ce qui comptent, ce sont les centimètres en moins. Lorsque je mesure mon tour de ventre.
Je bois toujours beaucoup d’eau. Je me suis mis au café. Un diurétique naturel. Lorsque j’urine, je crois déceler l’odeur du gras qui s’échappe.
Je me sens faible, mais ce n’est pas grave. J’alterne café et sieste. Je parviens à tenir une journée.
Demain, j’arrêterai sans doute le lait. J’ai vérifié ses valeurs nutritionnelles. Et je suis tombé des nues.
En vérité, tout est calorique. Trop calorique. Faute à cette industrie agro-alimentaire qui cherche à nous faire acheter toujours plus d’aliments. Quitte à nous empoisonner.
J’aurais pu le faire confirmer par mon diététicien. Sauf que je ne lui rends plus visite. Avec ses paliers, son discours bio et ses intentions de me cadrer, il m’empêchait de fondre à vive allure.
30 juin 2013 – 16 heures.
Trente kilos de moins.
Je croyais ce chiffre impossible.
Je suis euphorique.
Dans le miroir pourtant, je me trouve toujours aussi laid.
Ma peau distendue est loin de ce à quoi je m’attendais.
Par contre, je suis très fatigué, presqu’épuisé.
Je dors mal, les heures filant tandis que je me tourne et me retourne dans le lit.
La tête trop vide pour lire, trop usée pour suivre un film, je reste dans le noir à fixer les murs, le plafond.
Je crois y voir des amis d’enfance, mes parents, mes grands-parents.
Puis le jour se lève et efface tous ses souvenirs projetés pour me laisser face à ma faim.
Car j’ai faim.
Mais je résiste.
Mon objectif est toujours le même. Revenir au poids d’équilibre. Rejoindre la masse.
Je vais attaquer la phase 3 !
Un café.
Une feuille de salade.
Un verre d’eau.
12 juillet 2013 – 22 heures.
Quarante kilos.
Assis devant l’ordi.
Mal au crâne.
Mal aux yeux.
Je ne mange plus.
Encore quelques kilos.
Et ce sera bon.
Phase 4 !
25 juillet 2013 – 03 heures.
Faible.
Trop.
Respire.
Difficile.
Assis.
Fixe.
Le vide.
Heures passent.
Temps file.
Suis normal.
Enfin.
Soixante kilos.
En moins.
Suis presque beau.
Beau.
BEAU !
C’est au petit matin du 28 juillet 2013 que les pompiers ont enfoncé ma porte. J’étais étalé sur mon clavier, les yeux vitreux, la peau sèche, les entrailles vides, déjà pourrissantes.
Je pesais trente kilos lorsque mon corps fut autopsié par le médecin légiste. Son examen révéla que mon cœur n’avait pas tenu.
Était-ce d’avoir trop maigri ou d’avoir reçu trop d’assauts ? Je ne le saurai jamais. Mais je tenais à témoigner, à t’expliquer comment ça c’était passé. Parce qu’après tout, si je suis aujourd’hui dans une urne, mon taux de masse grasse étant tombé à 0, c’est un peu grâce à toi.
Merci.
Enculé.
Un texte un peu dérangeant, voire même effrayant. Qui nous renvoie à la fois à notre propre apparence et à la façon dont nous regardons notre prochain. L’un de mes essais préférés sur ce blog!
Merci!
PS: Je note que le point Godwin a été très rapidement atteint dans ce monologue: « Dans ta vision du monde, t’es-tu seulement rendu compte que tu étais presque un nazi ? »
😀 😀 😀
Olivier
Je dois d’ailleurs y faire gaffe : la Licra compte l’interdire…