L’elfe observait le decker qui observait le rigger. Un peu plus loin, le samouraï des rues surveillait la rue (ce qui tombait bien… et m’interpelle un peu: un samouraï des avenues peut-il surveiller une rue ? Et inversement ?).
– Alors ? demanda le decker.
– J’y suis presque, répondit le rigger, bras croisés au dessus d’une bière brune éventée.
Comme tout nain, ils l’avaient soudoyé avec de l’alcool. Et il ne leur avait pas coûté cher. Sans doute avait-il, comme beaucoup de ses compatriotes, un sérieux problème d’addiction. Quoiqu’il en soit, il avait une solide réputation. Et ils avaient confiance en lui. Ils avaient sollicité ses services pour pénétrer le bâtiment d’une grande corpo, immeuble impossible à fracturer, dans lequel ils comptaient bien trouver LA preuve, celle qui confondrait le maire de la ville. Le commanditaire, le maire adjoint, n’attendait d’ailleurs que celle-ci pour devenir calife à la place du calife.
– Magne ? balança le samouraï des rues.
– Trois drones sont dans les bureaux. C’est compliqué de manœuvrer autant d’appareil.
– Tu dois avoir l’habitude.
– Yep. Mais pas qu’on m’interrompt toutes les deux secondes. Attendez, je crois que je tiens un truc.
Un des drones se trouvait dans le bureau du big boss. Il s’était posé prêt de l’interco et s’était branché pour récupérer des données.
– Decker ?
Le maigrichon déroula son clavier souple et s’interfaça avec le drone. D’ici quelques secondes les verrouillages logiciels sauteraient.
– Ca t’es venu comment cet amour des drones ? demande l’elfe au nain.
– Des jeux vidéo. Je jouais à Dune 12. Un wargame en temps réel.
– Je connais.
– Puis j’ai suivi la formation, j’étais passionné. Et j’ai été enrôlé. Soldat lors de la guerre contre l’Empire Sud Américain.
– Humm.
– Puis j’ai découvert que même à distance, une guerre reste une guerre. J’ai démissionné. Je suis devenu ce que tu vois. Un runner de l’ombre (marque déposée – copyright tout ça).
– Humm.
– C’est bon, balança le decker. On a ce qu’il faut.
L’elfe dégaina son ares predator et tira une balle dans la tête du nain.
– Histoire touchante.
Il s’alluma un cigare, en guise de victoire, le reste de l’équipe déguerpissant.
Tout ça pour dire quoi ?
Une fois n’est pas coutume, on va parler « Presse ».
Dans le Courrier International de cette semaine, un article de deux pages, un témoignage sur un pilote américain de drone de combat. On y apprend que :
– piloter un drone c’est un truc mal vue (limite on le traitait de tapette),
– piloter un drone c’est compliqué,
– piloter un drone c’est pas en temps réel (décalage de quelques secondes, idéal pour des bavures qui tâchent),
– piloter un drone c’est tuer des gens,
– piloter un drone c’est faire la guerre.
A la fois intéressant, poignant, source d’idée (avec un poil de racolage quand même). Rien d’original, on le sait déjà, me direz-vous. Certes, mais c’est bien raconté.
Pour tous les fans de sf, de Shadowrun ou d’autres trucs du même acabit, je vous invite à vous jeter dessus.
Ps : contrairement à ce que la photo laisse croire, non, Angela n’est pas un drone piloté par le grand ordre du libéralisme.